lundi 27 juillet 2020

Partir ou aller


Je ne sais jamais vraiment comment dire. Je pars faire du vélo ou je vais faire du vélo.

Avant même de monter sur mon vélo pour accomplir la sortie dominicale, combien de fois ai-je fait le parcours dans ma tête. Elaborer un tracé est pour moi le fruit d'un lent mûrissement intérieur. Tout part d'une envie, celle d'aller voir ailleurs. Je ne me pose même pas la question de la distance ou du raisonnable. 

Consulter ma carte Michelin afin d'avoir une idée précise des points à suivre et ne pas trop m'égarer de mon objectif final. 

Préparer mon vélo, mon compagnon qui vit aussi la même chose que moi. Sans lui, impossible d'atteindre mon désir. Un fidèle, silencieux, qui brise le vent, m'ouvre la route, me porte et me supporte. Il ne me demande pas grand chose en échange, juste de bons soins. 

La météo est également à prendre en compte, même si nous ne maîtrisons pas les éléments, c'est quand même plus agréable de rouler dans des conditions acceptables offertes par les 4 saisons.

Jamais sans ma sacoche de selle qui me permet d'ailleurs d'emporter avec moi mes outils, quelques vêtements chauds, de la boisson et un ravitaillement basique. 

Je roule en solo, mais ne suis jamais réellement seul. La lumière et le soleil m'accompagnent, le souffle du vent me pousse ou me retient sur l'asphalte, les odeurs de sous bois ou de fermes pointillent mon trajet. 

Je suis en liberté dans cette immensité. Je ne suis cependant pas chez moi, je suis en terre animale et végétale. J'emprunte les couloirs dessinés par l'homme. Je ne sens aucune hostilité de la part des éléments que je traverse. Je suis humble et respectueux. La nature offre cette gourmandise pour le coeur, les yeux et l'âme.

Mon avancée presque silencieuse, dérange et perturbe quelques animaux. Ici un chat qui sursaute en me voyant arriver sur lui, là deux immenses lapins de garenne sur le bitume, plongent dans les sous bois en une fraction de seconde et enfin cette vache trop occupée à brouter et qui ne m'avait pas entendu arriver fait deux pas en arrière.

Même si j'apprécie mes trajets habituels, ces derniers me permettent de rester dans ma zone de confort. Mais j'ai aussi besoin d'aller faire du vélo pour me mettre en danger, montrer mes limites physiques et mentales. C'est toujours cette peur qui m'habite, celle de ne pas être capable d'aller au bout, celle de faillir et montrer mes faiblesses. Le cyclisme n'est pas une science exacte et c'est surtout pour moi un moyen d'exister. Je suis fait de chair. Je respire, je transpire, je m'essouffle. Certains jours, mon corps est capable d'exploits physiques et d'autres c'est tout le contraire. Il faut cependant accepter ces états. 

Mais quelle récompense que d'être allé au bout. Au terme de son défi. La douleur de l'épreuve est furtive. Ce n'est pas ce que je garde en moi en général. La mémoire est sélective et ne conserve que les belles choses, celles qui nous ravissent. Celles qui nous remettent à notre place de mortel. Partir ou aller, l'essentiel est tout autre. C'est se découvrir un peu plus chaque fois et s'enivrer du monde et des espaces qui nous entourent.

mercredi 1 avril 2020

Distance


La distance étant ce qui nous sépare de l'autre, qu'il soit homme ou lieu. Ce mot prend aujourd'hui une couleur toute particulière. En général, nous sommes maîtres de nos déplacements, c'est le fondement même de nombres de démocratie, puisque nous pouvons l'associer à un droit fondamental, la Liberté. Liberté d'aller ou venir, où et quand nous le désirons. 

C'est désormais un exercice imposé, par le contexte sanitaire. Ne plus s'éloigner de son domicile, ne pas dépasser le périmètre des 1 kilomètre. Garder également suffisamment de recul, envers ses collègues, ses commerçants habituels. Difficile figure qu'il faut intégrer dans nos actes quotidiens. S'éloigner de l'autre, des autres, vivre désormais dans un espace restreint où les corps ne se touchent plus, où même la parole doit parfois être censurée afin d'éviter tout risque de contamination par une projection salivaire.

Cette distance, la plus souvent choisie et aujourd'hui subie par toutes et tous. L'attirance avec le monde extérieur est tellement forte, et ancrée dans nos gênes. Nous sommes à l'origine des chasseurs cueilleurs, aujourd'hui en cage. Nous, cyclotouristes, savons ce que ce mot distance impose comme effort. Puisque en fonction de notre forme nous nous imposons des périples à vélo plus ou moins lointains et physiques. Cette distance fait peur et nous renvoie à nous même. Oui c'est un questionnement philosophique que de se retrouver dans cette situation. Pour ma génération, je suis de 1972, jamais je n'aurai pu imaginer vivre cela. C'est un grand coup de vent qui s'est abattu sur nous tous. Au revoir à nos programmes, nos rendez-vous, nos projets. Frustrations extrêmes que d'abandonner, un métier, une passion, une activité sportive.

Cette distance, c'est du vide dans nos vies, nos vies tellement riches de rencontres et d'activités. Aussi, n'est-ce pas le bon moment pour s'interroger et remettre en cause son propre modèle.  Voir ainsi, les choses qui nous manquent ou pas, les personnes qui comptent ou pas. Cette distance, ce vide il faut la mettre à profit. Sortir de cette épreuve en étant profondément transformé, s'être dépouillé du superflu, du toujours plus. Se sentir plus léger, comme une plume ou une feuille, qui au gré du vent s'envole et se pose. Car nous pensons légitimement être maîtres de nos vies, mais nous nous rendons bien compte que nous ne contrôlons pas tout. Dans cette époque formidable, où l'homme peut accomplir le meilleur comme le pire, où nous pouvons aller dans l'espace, inventer des produits multimédia qui transforment notre quotidien, nous sommes cependant tout petit et extrêmement fragiles. Il suffit d'un virus invisible à l'oeil nu pour mettre le monde sans dessus-dessous. 

mercredi 29 janvier 2020

Follis ou Mongilardi


Je ne suis généralement pas un "chasseur" de randonneuses. Tous les beaux vélos que j'ai pu posséder étaient le fruit du hasard. C'est évident que lorsqu'on consacre du temps à une quête bien précise on a davantage de chance d'être le premier sur le coup et de satisfaire ainsi sa soif.
Mais je trouve cela épuisant. Je me dis tant pis pour les vélos qui me passent sous le nez. Ils sont très certainement entre de bonnes mains et c'est cela l'essentiel. C'est certes une passion, la collectionnïte aigue de randonneuses anciennes, il ne faut surtout pas que cela devienne maladif. 

Quand au hasard d'une recherche sur internet je tombe sur un vélo que je trouve à mon goût et qui correspond à mes critères alors j'y mets toute mon énergie. 

C'est comme ma dernière trouvaille, un vélo sportif dame de la marque Mongilardi en 650. Très bien équipé et surtout dans un bel état de conservation vu son âge. Je manque de temps, donc la période où je passais des journées entières à retirer la rouille est révolue. J'achète le vélo plus cher c'est certain, mais c'est à ce prix. Je suis trop impatient de rouler avec. La petite cerise sur le gâteau,  c'est qu'il y a encore la plaque de la propriétaire qui habitait non loin de Clermont-Ferrand, à Lempdes pour être plus précis. C'est toujours émouvant.  Ce n'est certes qu'un vélo, mais c'est aussi une histoire passée avec son ancien propriétaire et la nouvelle histoire qui va s'écrire désormais. Ce vélo vient de Dijon, ville que j'affectionne particulièrement. Il revient donc aujourd'hui sur les routes d'Auvergne, là où il est vraisemblablement né. Entre les mains de François Mongilardi, célèbre cadreur Clermontois. Mais comment être sûr de cela, puisque le cadre ne comporte aucun numéro aucun marquage caractéristique. Seul un autocollant indique son origine. C'est un vélo qui a évolué avec le temps je suppose, en fonction de la volonté et du désir de son ancienne propriétaire. Il est comme ça aujourd'hui et je ne souhaite pas le modifier davantage, sauf à lui installer un beau double plateaux, adapté à nos routes et de beaux pneus grand bois en 650 x 32 B. Peu de travail donc, un bon nettoyage, dégraissage et réglage et changement des câbles de freins. J'ai l'impression de faire un retour dans le passé, avec ce beau dérailleur cyclotouriste 4 vitesses, ces jantes aluminium super champion, ces écrous papillons de roues Huret luxe, bref tout ce que j'affectionne. Ces tubes sont en durifort et les freins sont des mafac cantilever. Je m'interroge également sur le choix des garde boue, faut-il laisser ceux là ou bien les remplacer par des garde boue en aluminium. J'aime les beaux vélos, les belles lignes et que ça brille. Je vais donc réfléchir encore un petit peu. 

Rien de sûr dans ce bas monde, s'agit-il réellement d'un vélo Mongilardi, cela pourrait également être un Georges Martin ou un Folis ou un Prat. J'avoue ne pas être suffisamment documenté pour affirmer ce que j'écris. Ce vélo dame va rejoindre ma modeste collection et me servira pour mes trajets de week-end au pied du majestueux Puy-de-Dôme.










dimanche 9 juin 2019

Code de bonne conduite


"Fais moi une place" disent les paroles de la fameuse chanson de Julien Clerc. 
Car aujourd'hui plus qu'hier, la légitimité du cycliste en milieu urbain et rural est trop souvent mise à mal. Depuis le poste de pilotage de sa voiture le conducteur pense être le maître de la route. Mais il oublie trop souvent que c'est également un espace à partager, où tout le monde à sa place, à la seule et unique condition que celle de se respecter. Nous cyclistes, sentons bien notre fragilité au quotidien. Combien de fois ai-je été obligé de céder le passage à une voiture alors que j'étais prioritaire, ou bien de poser le pied à terre car j'ai risqué de me faire coincer entre les voitures en stationnement et celles qui roulaient. Et quand je circule à vélo au milieu de la route pour éviter nids de poule, caniveaux ou les ouvertures intempestives de portières je me fais royalement insulté et klaxonné.

Trouver sa place n'est vraiment pas chose aisée. Mais il ne faut pas se résigner. La loi est également là pour nous protéger. Afin de se sentir à l'aise sur la route, connaître nos droits et nos obligations, les éditions Dalloz ont récemment édité le Code du cycliste. Ce n'est pas à proprement parlé un Code officiel, mais il compile toutes les dispositions du droit applicables aux cyclistes. Il traite de façon thématique des obligations du cycliste, de ses équipements, des interdictions qui s'imposent à lui, mais également des droits réservés aux cyclistes, tels que le droit au respect et aux aménagements spécifiques. 

Ce Code nous le devons à un défenseur et pratiquant du vélo, mais aussi à un professionnel du droit, puisque Ludovic Duprey, son auteur, est l'actuel vice président adjoint du tribunal de grande instance de Lille. Cycliste depuis une dizaine d'années il a souhaité écrire ce petit livre afin d'éclaircir les règles tout en apportant de la pédagogie. 

Que vous soyez cyclistes, routiers, livreurs ce Code me semble très utile, non pas pour nous dresser les uns contre les autres, mais faire de cet espace public partagé un endroit plus respectueux des droits et devoirs de chacun. Avec en creux, l'idée qui serait de repenser le réseau routier en mettant en place, comme cela existe dans certains pays, un réseau routier parallèle entièrement dédié aux deux roues. Personne ne doit ignorer la loi, mais personne ne doit s'affranchir des règles.